Cartes et fictions (XVIe-XVIIIe siècle)

Ouvrage de Roger Chartier
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Bilbo le Hobbit, les Chroniques de Narnia et Le Seigneur des anneaux ont habitué leurs lecteurs à rencontrer dans le livre une ou plusieurs cartes des territoires qu’ils décrivent. En allait-il de même pour les lecteurs des fictions de la première modernité, entre les XVIe et XVIIIe siècles ? L’introduction de cartes n’allait pas de soi. Leur impression augmentait le coût des ouvrages, et la capacité des mots à produire des images mentales les rendait inutiles. Néanmoins, les cartes apparurent dans les œuvres d’imagination.

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Initiée avec les cartes des itinérances de don Quichotte et menant jusqu’aux éditions vénitiennes d’œuvres de L’Arioste et de Pétrarque, cette enquête s’est principalement attachée à deux généalogies. La première, anglaise, donne à voir les périples d’un voyageur imaginaire présenté comme bien réel : elle conduit des Voyages de Gulliver de Jonathan Swift à L’Utopie de Thomas More. La seconde, française et allégorique, a pour origine la Carte de Tendre, insérée dans la Clélie de Mademoiselle de Scudéry, et inclut les cartes galantes ou polémiques qui l’ont imitée. Selon les époques et les lieux, les cartes des fictions ont assumé divers rôles. Elles ont représenté des mondes à l’envers, satiriques, critiques ou utopiques ; elles ont brouillé la distinction entre le monde du livre et celui du lecteur ; elles ont nourri la raison et les rêves, au-delà même de la lettre du texte.

Cheminant d’œuvre en œuvre, Roger Chartier offre dans cet essai une nouvelle approche de la mobilité des fictions et de leurs interprétations.

La collection

La collection Faire savoir propose des ouvrages issus de recherches ancrées, sous différentes formes, au Collège de France. Elle prétend contribuer à « transmettre le savoir en train de se faire », conformément à la grande devise de l’institution, quels que soient la discipline ou le sujet abordé. Certains livres sont l’aboutissement de travaux extrêmement récents, absolument inédits, d’autres s’appuient sur des études plus anciennes, inédites également, dont la trace est conservée aux archives du Collège de France.

Le propos de cet essai n’est pas de suivre la multiplication des cartes après Tolkien, aussi bien dans le genre de l’épique fantastique que dans les livres pour la jeunesse. Un tel chemin nous mènerait à Harry Potter et à Game of Thrones. Le parcours proposé ici est inverse. Il vise à dresser une généalogie historique de la présence de cartes dans les récits de fiction. […] Toutes les cartes retenues dans cette enquête accompagnent des romans, des satires, des utopies ou des dystopies, même si ou, plutôt, surtout si ces fables appartiennent à des genres supposés dire le réel, comme par exemple les récits de voyage.

Historien. Directeur d'études EHESS, membre associé du Centre de recherches historiques (CRH, UMR 8558), École des hautes études en sciences sociales, Paris (en 2019)
Roger chartier, auteur cartes et fictions
Published at 7 February 2023