Séminaire Maghreb 2020 : État, nation et société

Pour de nombreux observateurs, les pays qui forment l’ensemble géographique Middle East and North Africa (MENA) selon la terminologie anglo-saxonne, pourraient constituer l’épicentre d’une vaste crise internationale. Dans la partie occidentale, les pays du Maghreb relèvent-ils de cette hypothèse ? Rien ne l’annonce mais rien ne l’exclut. Ces états se situent à des degrés divers sur une ligne de partage, confrontés qu’ils sont à de réels facteurs de déstabilisation, de l’enracinement djihadiste au sein de leur société jusqu’aux profondes incertitudes politiques, sociales et économiques dans lesquelles ils évoluent.

Dans ces conditions, leurs dirigeants ont de bonnes raisons d’hésiter sur la voie à suivre. Quelle vision d’avenir et quel chemin emprunter qui ne soit ni une course incertaine à d’introuvables réformes ni le confort factice de l’immobilisme et du repli identitaire ?

Des mutations profondes sont en effet à l’oeuvre dans les sociétés maghrébines. La démographie, l’éducation, la sociologie, l’économie, le sentiment religieux, les relations régionales, le rapport aux pays occidentaux sont autant de forces entremêlées qui ne resteront pas muettes longtemps dans un contexte où les changements générationnels sont désormais une réalité ; si le passé des dernières décennies commande encore le présent, il achève de s’éteindre sous nos yeux, laissant place à des hommes et des femmes qui ont eu vingt ans dans les années 2000. Ces générations auront elles aussi à affronter la question de l’Etat-nation, fragilisé par d’autres logiques d’intégration au sein de différentes communautés territoriales ou sociales, par les processus d’exclusion économiques et d’émigration (de pair avec l’apparition d’élites aux ambitions différenciées, aristocratie d’Etat, apparatchiks de partis, capitaines d’industrie, etc.) et par l’attrait de l’islamisme et du djihad sur les populations.

Le Maghreb est la région du monde qui entre le plus immédiatement dans la profondeur stratégique de la France. Les points d’entrée ne manquent pas pour se persuader que l’avenir de la France se joue en partie dans le Nord de l’Afrique et, peut-être, inversement.

C’est dans cette perspective qu’Hestia Expertise organise un séminaire de réflexion autour des thèmes visant à identifier les principales lignes de fractures comme les points forts de ces pays. Huit séances permettront à des experts reconnus, pour certains d’analyser chaque état séparément (chacun son histoire, chacun son avenir) et pour d’autres, de traiter de thèmes transversaux. Le cycle s’achèvera par une séance conclusive et participative.

Chaque intervenant sera libre d’organiser ses propos autour des facteurs qui structurent l’avenir :

  • Les acteurs – individuels, communautaires, sécuritaires, économiques, nationaux ou étrangers, etc. – qui façonnent les rapports entre Etat, nation et société ;
  • Les luttes internes qui se jouent dans des paysages sociaux complexes, au sein desquels la classe des affaires, souvent dynamique, agit selon des logiques à la fois bénéfiques et oublieuses de pans entiers de la société ;
  • La question de l’Islam au centre des mutations en cours qu’elles soient politiques, sociales ou idéologiques ;
  • Le poids du passé dans le rapport avec l’ancienne puissance coloniale ;
  • Enfin, la dimension territoriale entre identités régionales et flux migratoires.

Conformément à la charte de l’association, les entretiens seront ouverts exclusivement sur invitation et se dérouleront selon les règles de Chatham House. Ils auront lieu à la Maison Suger, 16 rue Suger, 75006 Paris, de 18h à 20h, sur un rythme mensuel au cours de l’année 2016.
Enfin, il est signalé la bibliographie, en ligne sur le site de l’association (http://hestia.hypotheses.org/maghreb), créée à l’occasion de ce séminaire.


Calendrier prévisionnel

  1. 1er mars 2016, Tunisie, l’espoir est toujours permis, Habib KAZDAGHLI, professeur d'Histoire contemporaine, doyen de la Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de Manouba (Tunis). Auteur de nombreux ouvrages et articlesscientifiques sur la Tunisie, le professeur Kazdaghli est l’ardent défenseur de la laïcité au sein de l’université.
  2. 22 Mars 2016, L’Algérie, élites et mouvements sociaux, Aïssa KADRI, professeur desociologie, ancien directeur de l'Institut Maghreb Europe (Université de Paris 8). Ses recherches académiques se concentrent sur les systèmes éducatifs et la migration dans la région du Maghreb, en particulier sur la question des intellectuels et de l'intelligentsia, des mouvements sociaux, et des droits de l'homme. Il coordonne « printemps arabe », programme européen d'excellence dans un consortiumcomprenant 7 universités, traitant des mouvements sociaux dans le monde arabe.
  3. 19 Avril 2016, La Libye, espérer quoi ? Ali BENSAAD, Maître de Conférences en géographie HDR à l’Université d’Aix-Marseille, chercheur résident à l’Ecole française de Rome, a récemment dirigé la publication de La Libye. De la révolution au chaos, Moyen-Orient N° 25, 2015, et l’Atlas de la région Saharo-sahélienne, 2014, Paris, OCDE-Club du Sahel.
  4. 18 Mai 2016, Le Maroc, un royaume à l’épreuve ? Pierre VERMEREN, professeur des universités, Panthéon Sorbonne, Institut des mondes africains, spécialiste de l’histoire du Maroc contemporain, co-animateur d’un séminaire de recherche sur les confréries à l’Institut d'études de l'Islam et des sociétés du monde musulman (EHESS), auteur de Le choc des décolonisations, de la guerre d'Algérie aux printemps arabes (Odile Jacob, 2015), Misère de l'historiographie du Maghreb postcolonial 1962-2012 (Publications de la Sorbonne, 2012), Maghreb, les origines de la révolution démocratique (Pluriel, 2011) et de Histoire du Maroc depuis l'indépendance (La découverte, 2010 ).
  5. 21 Juin 2016, Etat, nation et société, Séverine LABAT, ancien membre du CADIS (CNRS-EHESS), auteur-réalisatrice de documentaires et d’émissions de radio, auteur de Les islamistes tunisiens, entre l'Etat et la mosquée (Demopolis, 2014), La France réinventée : les nouveaux bi-nationaux franco-algériens (Publisud, 2010), Les islamistes algériens entre les urnes et le maquis (Seuil, 1995) ;
  6. 20 Septembre 2016, Les systèmes de sécurité nationale après le printemps arabe, par qui, pour qui ? Agnès LEVALLOIS, ancienne responsable du bureau monde arabe et persan à la Délégation aux Affaires stratégiques (ministère de la Défense), ancienne directrice de l'information de RMC MO (filiale arabophone de RFI) puis directrice de l'antenne arabe de France 24 ; maitre de conférences à l’IEP Paris ;
  7. 15 Novembre 2016, La société au prisme de l’économie, Raouf BOUCEKKINE, professeur à Aix-Marseille Université depuis 2011. Directeur général de l’Institut d’Etudes Avancées d’Aix Marseille, Directeur scientifique du LABEX, Aix-Marseille School of Economics, membre senior de l’Institut Universitaire de France.
  8. 8 Décembre 2016, Le Maghreb et le Sahel, les mutations d’un espace carrefour, Ali BENSAAD, Maître de Conférences en géographie HDR à l’Université d’Aix-Marseille, chercheur résident à l’Ecole française de Rome, spécialiste des relations entre le monde arabe et l’Afrique sub saharienne (circulations, échanges, brassages, conflits).
  9. Décembre 2016, France Maghreb, quel dialogue pour l’avenir ? séance conclusive, à laquelle à laquelle seront conviés tous les intervenants, sous la direction de Jean-Claude COUSSERAN, ancien ambassadeur de France en Syrie, en Turquie et en Egypte.
Published at 2 March 2016