Résister au Plantationcène

Le Séminaire d'Anthropologie Américaniste propose une réflexion sur les débats contemporains de l'anthropologie américaniste portant sur des sociétés amérindiennes, en croisant les perspectives de l'ethnographie, de l'histoire, de la politique, de l'économie, de la linguistique ou de l'ethnomusicologie.

Découvrez la quatrième séance du séminaire 2023-2024 : Résister au Plantationcène : À la recherche de quelques pratiques de contre-domestication.

Une thèse qui traverse l'histoire de la philosophie politique moderne est qu'il existe un lien particulier entre l'État et l'agriculture. Tout État est par définition agricole. Cette thèse est à la base de l'idée de la révolution néolithique, qui a sous-tendu des études en archéologie, en histoire et même en anthropologie.

Deux propositions issues d'études plus ou moins récentes seront ici discutées :

1. Toute agriculture ne conduit pas à la sédentarisation et à l'État
2. Toute agriculture n'est pas domesticatrice, c'est-à-dire qu'elle produit une dépendance reproductive des plantes à l'égard de l'homme.

Le problème n'est pas l'agriculture en tant que telle, mais sa forme intensive, maximisée dans le modèle de la plantation coloniale. Cela conduirait à une sorte d'hyper-domestication, c'est-à-dire à une forme de contrôle de certaines espèces végétales par une forte simplification écologique, qui passe nécessairement par le contrôle des corps et des populations, humaines et non-humaines. D. Haraway et A. Tsing ont défini le Plantationcène comme un autre nom pour l'Anthropocène, cette époque géologique dans laquelle les humains deviennent une force incontrôlable, menaçant la Terre toute entière. Si le Plantationcène est le royaume de l'hyper-domestication, y résister reviendrait à rechercher des pratiques de contre-domestication. Des pratiques qui ont toujours été mises en œuvre par les peuples amérindiens et marrons, précisément ceux qui ont été et continuent d'être expulsés de la terre et qui sont subjugués par les projets coloniaux et capitalistes. Ce point sera poursuivi au cours de cette séance , et qui prendra pour exemple les amérindiens.

• Karen SHIRATORI (Université de Coimbra)
• Renato SZTUTMAN (Université de Sao Paulo)