Jean-François Bayart | Violence et religion dans le champ africano-français

Séminaire Violence et sortie de la violence | 20 décembre 2018
Jeudi
20
décembre
2018
17:30
19:00
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Le rapport privilégié que la religion entretiendrait avec la violence est devenu l’un des poncifs du débat public. En proie au djihadisme et au radicalisme politique du christianisme évangélique, l’Afrique semble être un cas d’espèce. Mais cette pseudo-évidence soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. De quelle violence, de quelles religions, et même de quelle Afrique parle-t-on ? La guerre, en Afrique, a été politique, et non pas religieuse. Elle a eu pour objet le contrôle de l’Etat et des ressources, plutôt que celui des âmes, même si elle a pu emprunter, ici ou là, le langage de Dieu.

Le chassé-croisé de la violence et de la religion doit être analysé au cas par cas, à l’échelle des terroirs historiques. Aux antipodes des généralisations idéologiques apparaît alors un objet sociologique très circonscrit : des mouvements armés d’orientation religieuse qui participent d’obédiences diverses, aussi bien islamiques que chrétiennes, conduisent des insurrections sociales, mais occupent une place marginale dans les interactions entre Dieu et César. Au fil de cette réflexion, c’est toute l’histoire de l’Etat en Afrique qui apparaît sous un jour nouveau. Mais aussi la question du djihadisme qui est désormais au coeur de la relation entre l'Afrique sahélienne et la France, tout en étant appréhendée à travers un effet de loupe des plus dommageables, nonobstant les évidences historiques, sociales et politiques.

 

Jean-François Bayart, ancien directeur du CERI (1994-2000), fondateur des revues Politique africaine et Critique internationale, est professeur à l’IHEID de Genève, et titulaire de la chaire Yves Oltramare « Religion et politique dans le monde contemporain ». Spécialiste de sociologie historique comparée du politique, il travaille sur la formation de l’Etat dans le contexte de la globalisation et sur les pratiques de subjectivation politique, en particulier en Afrique sub-saharienne, en Turquie et en Iran. Il est l’auteur d’une série d’ouvrages de références, L’Etat en Afrique : la politique du ventre (réédité en 2006), L’illusion identitaire (réédité en 2018) ou encore Le gouvernement du monde: une critique politique de la globalisation (2004). Il a récemment publié Violence et religion en Afrique (Karthala, 2018).

 

Publié le 20 décembre 2018