Adventures of Identity: From the Double to the Avatar

Jeudi
13
Déc.
2018
Vendredi
14
Déc.
2018
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Colloque organisé par Andrea Pinotti (Università Statale di Milano / IEA de Paris 2017-2018), avec le soutien de l'Istituto Italiano di Cultura di Parigi et de la FMSH (programme Politiques des images).

 

Les récents développements en matière de techniques de création d’images ont entraîné un flou du seuil entre le monde de l’image et le monde réel. Les environnements virtuels immersifs et interactifs suscitent chez l’utilisateur un fort sentiment d’incorporation dans un monde autonome. Une telle incorporation peut être véhiculée par l’« avatar », un délégué numérique par lequel le sujet interagit avec des objets synthétiques ou d’autres avatars.

Loin d’être un terme inventé à l’époque contemporaine, la notion d’« avatar » est enracinée dans l’ancienne tradition hindouiste: le terme sanscrit désigne la descente sur terre, l’apparence matérielle, la manifestation sensible ou l’incarnation d’un dieu ou d’une déesse (principalement Vishnu). Dans la culture occidentale, il est devenu associé à des notions apparentées telles que le « double », l’« alter ego », le « Doppelgänger », l’hologramme.

L’expérience de l’avatar soulève de nombreux problèmes transdisciplinaires.

Sous l’angle de l’histoire des images, l’avatar constitue non seulement un chapitre fondamental des pratiques visuelles contemporaines, mais également une variation significative des genres du portrait et de l’autoportrait, qui peut également s’hybrider avec la production des « selfies ». D’un point de vue philosophique, anthropologique et sociologique, l’avatar influe sur des questions fondamentales liées à l’identité, à la subjectivité et à l’intersubjectivité. D’un point de vue psychologique, psychanalytique et neurologique, il est lié à des questions telles que la personnalité multiple ou divisée, l’incorporation, la « body ownership », la représentation de soi, la proprioception, la mise en œuvre de prothèses, l’empathie. Du point de vue des études sur les médias, il représente l’intermédiaire numérique par lequel l’utilisateur interagit avec l’environnement virtuel et les autres utilisateurs. Les questions éthiques, juridiques et politiques jouent également un rôle crucial dans l’expérience des avatars, car non seulement nous opérons à travers l’avatar dans le monde numérique, mais aussi les avatars peuvent avoir des effets sur la vie réelle, en modifiant par exemple les préjugés sexistes, idéologiques et raciaux. L’usage de l’avatar peut insister sur la représentation « authentique » de soi ; mais l’avatar peut également être utilisé pour dissimuler son identité, devenant un véritable masque : la simulation imitative d’un côté, la dissimulation trompeuse de l’autre constituent par conséquent les deux extrêmes traversés par la polyvalence de l’avatar.

Comme c’est toujours le cas avec les innovations technologiques et liées aux médias, la diffusion des avatars déclenche des réactions remarquablement polarisées : d’un côté, les techno-enthousiastes (qui saluent avec optimisme la possibilité de mener plusieurs vies dans des mondes parallèles), d’autre part, les techno-apocalyptiques (qui craignent la perte d’identité, la liquéfaction et l’aliénation). La fracture entre ces deux parties devrait encore se creuser dans l’avenir, compte tenu des énormes investissements technologiques et économiques consacrés au développement d’environnements virtuels en général et d’avatars virtuels en particulier.

En réunissant des spécialistes de différentes disciplines, le colloque a pour objectif de traiter ces problèmes multiples d’une perspective critique, en examinant le statut problématique et controversé de l’avatar, qui doit être défini de manière urgente.

 

 

Publié le 13 décembre 2018