Peut-on critiquer ou défendre le capitalisme de manière non-normative ?

Rencontres autour de l’investissement à impact | Jeudi 9 juin 2022
Jeudi
09
juin
2022
17:00
19:00
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Intervention de Sina Badiei (Centre Walras-Pareto (Université de Lausanne) / Collège International de Philosophie (Université Paris Lumières) pour la quatrième Rencontre autour de l’investissement à impact du premier semestre 2022, organisée par Christian Walter et Émmanuel Picavet, titulaires de la Chaire Éthique et finance.

Karl Marx, Ludwig von Mises et Milton Friedman font partie des économistes qui manifestent un fort scepticisme quant à la possibilité d’une discussion et d’une analyse rationnelles des normes qui doivent régir la réforme des institutions publiques. Cependant, ils se distinguent de la plupart des autres économistes qui adoptent cette position sceptique par le caractère éminemment normatif et politique de leurs écrits sur le capitalisme. Marx est souvent considéré comme le penseur qui a produit la critique la plus rigoureuse du capitalisme. Mises est l’un des derniers économistes à défendre systématiquement et explicitement le laissez-faire, à la différence des partisans plus contemporains du laissez-faire qui se contentent souvent de critiquer toute intervention publique en raison des présupposés dits paternalistes de ces interventions. Friedman, quant à lui, fut l’un des premiers économistes américains ultralibéraux à rompre explicitement avec le laissez-faire, ce qui ne l’a pas empêché de soutenir que ce qu’il appelait le capitalisme de concurrence était la seule forme d’organisation sociale compatible avec le respect de la liberté individuelle.

Dans cet exposé, et en m’appuyant sur le travail effectué dans mon ouvrage « Économie positive et économie normative chez Marx, Mises, Friedman et Popper », je tâcherai de montrer que Marx, Mises et Friedman ne parviennent pas à justifier leur critique ou leur défense du capitalisme de manière convaincante. J’essaierai de montrer que tel est le cas principalement en raison de leur dévaluation de l’analyse rationnelle et systématique des normes et des valeurs. Je soutiendrai de surcroît que pour envisager une réponse satisfaisante à la position sceptique de Marx, Mises et Friedman à l’égard des analyses normatives, il faut essayer de distinguer les évaluations systématiques qui étudient les normes régissant la réforme des institutions publiques et les évaluations qui étudient les normes et les valeurs régissant le comportement personnel des individus.


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Les rencontres autour de l'investissement à impact

Née il y a plus de 10 ans aux États-Unis, la notion d’investissement à impact recouvre tout investissement qui recherche explicitement à la fois une rentabilité économique et la création d’un impact social et environnemental positif et mesurable. Dans la mise à jour établie en 2019 de la définition adoptée en 2014 par le comité consultatif français sur l’investissement à impact, l’investissement à impact est défini comme un investissement qui vise explicitement et de manière intentionnelle un retour social et/ou environnemental positif ainsi qu’une performance financière supérieure ou égale à zéro, et dont l’impact est mesurable par un processus continu d’évaluation. L’intentionnalité des investisseurs / financeurs se manifeste au niveau des choix d’investissements / financements mais également dans l’accompagnement des organisations à impact. La mesure de l’impact social et/ou environnemental repose sur la mise en place d’objectifs prioritaires dont le suivi permet d’accompagner les organisations à faire progresser leur impact.

 

Publié le 9 juin 2022