Intensifier les accumulations et accélérations : jeux ou sérieux olympiques ?


« Plus vite, plus haut, plus fort » : à peine nuancée par le rajout « ensemble », la devise olympique valorise la compétition et résume l’emballement capitaliste où croissances et accélérations se conditionnent réciproquement. Or, en 2024, la succession de championnats mondiaux culminera avec les premiers JO d’été en France depuis ceux de Paris en 1924. Nécessairement déficitaires – lors du choix de la ville hôte, est retenue la candidature la plus mirobolante (qui surestime les retombées et sous-estime les coûts) –, les JO sont un investissement dans une fuite en avant unidimensionnelle guidée par le classement quantitatif « où le sport sera célébré à chaque coin de rue » (Dossier de candidature de Paris 2024). Il s’agit de mettre en valeur territoires et populations pour les projeter dans la concurrence mondiale.
Si Pierre de Coubertin, créateur des JO modernes et bénéficiaire de gratifications y compris financières du régime nazi, a célébré « la grandiose réussite des Jeux de Berlin » en 1936, « illuminés par la force et la discipline hitlériennes », c’est que « le sport tuera l’érotisme » et les JO, loin de l’esprit joueur, exercent un dressage fascisant sur les athlètes comme sur les populations. La propagation de valeurs militaires – hiérarchie et obéissance, uniformes et parades, souffrance et sacrifice, virilité et héroïsme – se complète par l’invitation au défoulement. La diversité sociale s’efface dans cet exutoire nationaliste des frustrations et la spectacularisation de la vie publique.
Inspiré d’une pédagogie interactive, le séminaire, gratuit, s’adresse à tous les intéressés et notamment aux étudiants et chercheurs en sciences humaines, en droit et en philosophie.
Programme 2022
- Mardi 8 mars | “La compétition sportive, même féminine, triomphe de la virilité guerrière ?”
avec Catherine Louveau, professeure émérite de sociologie du sport à l’Université Paris-Sud, coauteure de Sports, école, société : la différence des sexes. Féminin, masculin et activités sportives, L’Harmattan 1998
- Mardi 22 mars | “La nécessité du dopage, de l’appareillage des corps et de l’entraînement nocif dans la compétition sans limites”
avec l’ancien préparateur physique et biologique de sportifs Cyrille de Vergie, diplômé d’État, auteur de Confessions d'un dopeur : Dopage, trafics, violences... les dessous du sport, Nouveau monde éd. 2022, et le docteur en sociologie du sport à l’Université de Paris Christophe Brissonneau, coauteur de Doping in elite sports : Voices of French sportspeople and their doctors, Routledge 2018
- Mardi 5 avril | “Surveillance, conduite des foules et massification du spectacle remplaçant la fêteˮ
avec David Colon, professeur d’histoire à Science-Po Paris et auteur de Les maîtres de la manipulation : Un siècle de persuasion de masse, Tallandier 2021, et Martin Drago, juriste à La Quadrature du Net
- Mardi 19 avril | "La propagation de la performance et de la concurrence”
avec Wladimir Andreff, professeur émérite d’économie à l’Université de Paris, président de l’International association of sport economists, auteur de La face cachée du sport. Dérives économiques et scandales financiers, de Boeck 2021
- Mardi 10 mai | “L’enrôlement olympique de la nature, de l’histoire, de la culture, de l’éducation et du handicap”
avec Marc Perelman, architecte, professeur d’esthétique à l’Université Paris-Ouest, auteur de Les Jeux olympiques n’ont pas eu lieu, Éd. du Détour 2021
- Mardi 24 mai | “Artificialisation des sols, éviction des pauvres et poursuite de la centralisation”
avec Thierry Paquot, professeur émérite de philosophie à l’Institut d’urbanisme de Paris, auteur de Désastres urbains. Les villes meurent aussi, La Découverte 2019
- Mardi 7 juin | “Une prétention ludique au détriment du jeu et de la fête”
avec Ronan David, docteur en sociologie, enseignant-chercheur à l’Université de Caen, coauteur de Jouer le monde : Critique de l’assimilation du sport au jeu, Le Bord de l’eau 2017
- Mardi 21 juin | “La ‘sportification’ des sociétés, une mobilisation générale, voire fascistoïde ?”
avec Jean-Marie Brohm, professeur émérite de sociologie à l’Université Montpellier III, auteur de Le mythe olympique. Coubertin et la religion athlétique, Quel sport ? éd., nlle éd. 2021
Contact et informations
Christopher Pollmann | pollmann5@univ-lorraine.fr +33(0)3 87 76 05 33
Lieu : EHESS, 54 bd. Raspail, Paris 6e, Mo Sèvres-Babylone