L'Institut Fictionnel d'Afrique Noire

Parution du troisième numéro de la revue "Trouble dans les collections"

Le troisième numéro de la revue Trouble dans les collections, intitulé L'Institut Fictionnel d'Afrique Noire et coordonné par Emmanuelle Chérel, est disponible en ligne.

L'Institut Fictionnel d'Afrique Noire

Thierno Seydou Sall plaida pour l’instauration de l'Institut Fictionnel d'Afrique Noire. Abouté au musée Théodore Monod d’art africain, cet institut ne serait pas un territoire fermé ou amarré, mais une figuration de l'a-venir, pour affirmer des avenirs possibles, nos aspirations à la métamorphose. Ce numéro soutient la création d'un tel espace, avec les contributions de Julien Bondaz, Oulimata Gueye, Anaïs Mauuarin, Ruth Colette Afane Belinga, Josèfa Ntjam, Diane Cescutti, Ibrahima Thiam, Giulia Paoletti, Olivier Marboeuf avec Fou malade, Rossi Jacques Casimir et Zakh Turin, El Hadji Malick Ndiaye pour un hommage à Ibrahima Sow.

S’imposant comme un horizon, cet institut offrirait un espace, un temps, de recherche, d’ancrage et de fuite. Il contribuerait à l’effort commun engagé pour quitter les vieilles catégories (à la fois mortes et vivantes), dépasser les vocations naturalistes ou esthétiques des collections constituées durant la période coloniale et défaire les spectres des chronologies normatives. Sa responsabilité serait de mettre à mal les logiques de découpage et de classification, d’invalider les oppositions dichotomiques (telles que nature-culture, fiction-réalité), d’enrayer la monstration pétrifiée des objets et combattre encore certaines doxas théoriques, clôtures académiques et routines institutionnelles. La proposition qu’il ferait est d’inclure d’autres récits, d’autres savoirs et connaissances et de transmettre des absences. D’appréhender d’autres relations complexes et mouvantes qui se jouent entre pa.ma.trimoines, territoires, histoires, mémoires, traductions, liaisons, transmissions, transformations afin de mieux les connaître mais aussi les bouleverser et les fabuler. De modifier nos sensibilités, de cultiver d’autres rapports à soi même et au monde par les univers de l’art, la poésie, avec leurs spéculations. De s’affirmer comme une matrice de projections et de germinations pour surmonter les béances de l’histoire collective, avec ses manques, ses vides, ses approximations, ses leurres, ses malaises. De considérer l’Histoire comme le récit de tout ce qui naît, de tout ce qui pourrait advenir ou devenir. De retravailler les fictions, de diffracter et multiplier les récits ouverts, afin de créer un milieu plus dense du fait de la variété de leurs versions. De trouver de nouvelles trames et directions narratives, de multiples ressorts, une fabrique permanente de sens possibles qui nous entraînent ailleurs, et qui nous déroutent. De laisser parler les êtres et les choses dans leurs différents modes d’existence, de regarder au-delà, c’est à dire vers ce qui mène à plus d’existence.

Cet Institut fictionnel d’Afrique Noire serait une constellation en expansion de gestes, d’actes, de performances, de migrances, de rêves, de transes, de configurations, de conjonctions, de cohabitations, de tensions, non patrimonialisables, permettant d’être parmi les choses (et non au-dessus d’elles) et de déployer une expression toujours renouvelée. Tel un intercesseur, cet institut soutiendrait les récits et les objets en les considérant comme des vecteurs de vitalité, construisant des relations affectées, une écologie des êtres ou des choses tenant compte de leur puissance d’agir et de l’effectivité de leur présence.

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Ce projet est lauréat de l'appel à projet Mondes en mutation 2020 de la FMSH. Il est rattaché au CRENAU (UMR 1563 CNRS) de l’École Nationale Supérieure d'Architecture de Nantes dans le cadre de sa convention avec l'École des Beaux-Arts de Nantes Saint-Nazaire.

Publié le 7 janvier 2022