Elise Haddad

Lauréate du programme Atlas 2024
Elise Haddad

Élise Haddad est historienne des images médiévales et de la première modernité en Europe et en Nouvelle-Espagne. Docteure de l'EHESS, elle est chercheuse correspondante d'Ahloma (CRH-EHESS, Paris). En 2024-2025, elle est ATER en histoire de l’art à l’université Grenoble Alpes et enseigne le nahuatl classique à l’INALCO.

Ses recherches ont d’abord porté, dans le cadre de sa thèse, sur les images monumentales et manuscrites de l’Apocalypse. Elle les a étudiées sous trois angles : l’iconographie, à travers le tympan roman de Beaulieu-sur-Dordogne et les représentations des épreuves et combats apocalyptiques ; l’histoire sociale des images et de leurs usages par les institutions et groupes sociaux ; et enfin l’anthropologie des images, en analysant leur évolution sur le temps long.

Depuis quelques années, elle explore un nouveau champ de recherche sur les images des différents peuples du monde. D'abord dans les Apocalypses, puis sur divers supports en Europe et en Nouvelle-Espagne, elle étudie les processus de construction de l’altérité à travers les documents figuratifs, ainsi que les éléments structurants qui régissent la représentation et la hiérarchisation des peuples les uns par rapport aux autres.

Le projet

Titre : Image de l’Indien dans l’iconographie monumentale du XVIe siècle en Nouvelle Espagne.

« L'objet de ce séjour est un relevé photographique méthodique des œuvres monumentales – peintes ou sculptées – dans les édifices du XVIe siècle en Nouvelle Espagne, afin de constituer une base de données comprenant des informations telles que la date, le lieu et la congrégation associée (Franciscains au premier chef, mais aussi Dominicains ou Augustins).

Dans les contextes conventuels, la peinture cultuelle ou hagiographique tient une grande place. La représentation de personnages indigènes est ténue. Elle ne s’intègre qu’exceptionnellement dans les sujets principaux, mais peut se trouver dans les décors dits grotesques, par exemple Tepeapulco ou dans les scènes de bataille bien connues de Ixmiquilpan. Il est actuellement peu facile de trouver un relevé photographique systématique et de qualité suffisante pour le motif qui nous occupe, souvent relégué aux zones considérées comme décoratives ou périphérique, il est nécessaire de disposer d’un relevé attentif pour multiplier les occurrence et comprendre les différents choix de figuration qui ont pu être opérés. De plus, les indices physionomiques ou phénotypiques peuvent être ténus, euphémisés, et la lecture se joue par contraste entre les personnages ; il faut donc produire une photographie de qualité sur des motifs assez petits, et d’un étalonnage comparable entre personnages. En l’état, la bibliographie fournit des éléments épars, mais ne suffit pas à remplir cette fonction.

Cette base de données d'image a pour vocation d'alimenter plusieurs questions non-exclusives les unes des autres : comment les évangélisateurs figurent l’autre à évangéliser ? Mais aussi, au-delà de notre questionnement premier : comment les Indiens se ré-approprient-ils cette forme de figuration d’eux-mêmes, dans un contexte colonial dans lequel le regard du colonisateur s’impose comme un discours fort définissant les statuts sociaux, et par rapport auquel se construisent les identités ?

Concrètement, il s’agira de s’appuyer sur les différentes formes que prend la figuration de la corporéité indienne : traits reconnaissables, exagérés ou effacés. Ou encore, bien souvent, le vêtement ou la nudité. Et enfin, recours à des indices référentiels d’une tradition iconographique antérieure (profil des guerriers-jaguars à Zinacantepec). Il faudra repérer les motifs mobilisés, mais aussi et surtout la manière dont ils sont agencés et contrastés les uns aux autres dans chaque ensemble. C’est en effet par système de traits différenciés que se donne à voir la constitution de groupes ethniques et leur assignation à des positions sociales. »

Institution d'accueil : Centre d’Études mexicaines et centraméricaines - CEMCA

Sélection de publications

  • Prévu pour 2025 : La coloración de la piel en los manuscritos de la Conquista: ¿marcador de alteridad étnica? in Forjando Mexico, ed. Guillaume Gaudin, Presses Universitaires du Midi.
  • Recension de Costilla Martínez Héctor Alejandro, Ramírez Santacruz Francisco, Historia adoptada, Historia adaptada : la crónica mestiza del México colonial, Madrid : Iberoamericana ; Frankfurt : Vervuert, 2019. Cahiers d’Amérique Latine, 2022.
  • Le bien à l'épreuve du mal : iconographie du portail et de l'église à Beaulieu-sur-Dordogne, Cahiers de Saint-Michel de Cuxa, n°50, 2020.
  • Former une communauté par la fin. Options eschatologiques romanes, portfolio dans Terrain n°71, avril 2019. pp. 158-181.
Publié le 19 février 2025