Histoire des cultures africaines de l’imprimé et des circulations transnationales de l’anticolonialisme

Présentation d'une recherche en cours dans le cadre des "Jeudis de la Maison Suger", séminaire de recherche des résidents.

Cette séance accueillera Arlena Buelli, lauréate du programme Atlas de la FMSH, pour une présentation de sa recherche en cours portant sur les circuits de communication politique ayant produit et diffusé des informations et de la « propagande » anticoloniales et antiracistes à travers l’Afrique et ses diasporas jusqu’aux décolonisations.

Le thème de la séance

« L’histoire des cultures africaines de l’imprimé périodique, profondément hétérogène et liée à des dynamiques transnationales dès le XIXᵉ siècle (liens entre l’Afrique de l’Ouest et l’abolitionnisme afro-américain, domination ottomane en Afrique du Nord, missionarisme chrétien), sera replacée au-delà des reconstructions classiques, souvent centrées sur l’État-nation.

Les périodiques anticoloniaux africains et afrodiasporiques (parfois dits « presse indépendante » ou « de protestation » [Switzer 1997]) sont une source précieuse pour l’étude de l’anticolonialisme et de la décolonisation, révélant les transformations de l’opinion publique dans les contextes coloniaux, marqués par la répression et la rareté. En se proclamant « la voix du peuple » [Asante 1977] dans de multiples contextes où le pouvoir de l’État coïncidait avec la domination coloniale, ils ont contribué à l’émergence de figures charismatiques et d’élites intellectuelles et politiques, ainsi qu’à la diffusion d’identités transnationales ou translocales.

Le séminaire réfléchira aux difficultés que pose une analyse historique de ces sources : le développement d’un débat imprimé et de ses publics lecteurs dans des contextes coloniaux ou ségrégués reflète des exclusions sociales, genrées et géographiques. On s’interrogera sur ces exclusions à travers l’étude de la réception et des pratiques de lecture socialement situées, au-delà des clivages de littératie, dans une perspective interculturelle.

Sur le plan méthodologique, on montrera comment l’enquête peut appréhender conjointement les processus transnationaux de collecte de l’information, de publication et de distribution, ainsi que les systèmes impériaux de contrôle et de censure des « littératures séditieuses » et les stratégies de négociation mises en place par éditeurs et publics subalternes. L’objectif est de mettre en lumière « l’infrastructure humaine » soutenant ces réseaux d’information et leur rôle dans les mobilisations contre le colonialisme et la ségrégation raciale, en révélant des connexions inattendues à partir des circulations matérielles. »

L'intervenante

Arlena Buelli est actuellement chercheuse postdoctorale et professeure adjointe à l'université de Naples Federico II. Ses recherches explorent le maintien de l'ordre transnational des anticolonialistes, de l'antifascisme intercolonial et les rencontres entre Arabes et Noirs pendant la guerre civile espagnole.