Politique marocaine de lutte contre le terrorisme

Quelle implication des spécificités du genre et des droits de l’homme dans le traitement des cas de femmes retournées de l’Etat Islamique ?
Jeudi
29
juillet
2021
17:00
18:30
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Nouvelle session du webinaire "La participation politique dans son contexte "extrême" au Moyen-Orient", organisé par la FMSH et l'Ifpo pour le projet PAVE. Interventions de Dr. Bahija Jamal et Noufal Abboud.

 

Présentation des interventions

Dr. Bahija JAMAL, maitresse de conférences en Droit international et en Relations internationales à l’Université Hassan II de Casablanca au Maroc, et consultante pour la lutte contre la traite des êtres humains et contre le terrorisme à l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), à L’Office des Nations Unies contre les Drogues et le Crime (ONUDC) et auprès du Conseil Européen.

Résumé

De par sa position géographique, le Maroc est confronté à plusieurs activités criminelles transnationales qui transcendent les juridictions nationales telles que le terrorisme. Pour y faire face, le Royaume du Maroc déploie, depuis de nombreuses années, des efforts importants pour mettre en place des réponses efficaces de lutte contre le terrorisme.

Cependant, le Maroc est toujours sujet de menace terroristes. En outre, l'idéologie terroriste reste convaincante pour des populations vulnérables, notamment les femmes. Selon le Directeur du Bureau Central des Investigations Judiciaires (BCIJ), lors d’une analyse sur les nouveaux défis sécuritaires au Maroc en 2021, parmi les 1654 Marocains ayant rejoint les rangs de l’Etat Islamique « DAECH », depuis son émergence en 2014, le nombre de femmes est de 288, dont 99 sont retournées au Maroc.

Comme le cas de plusieurs pays exportateurs de combattants vers DAECH, le retour de ces terroristes, y compris celui des femmes, constitue l’un des plus grands défis sécuritaires, humanitaires, juridiques et judiciaires pour le Maroc. Ces individus ont été formés à la fabrication d’explosifs, de poisons mortels et à commettre des attaques terroristes.

Bien qu’un nombre important de femmes au sein de DAECH assume principalement les rôles traditionnellement considérés comme féminins – ceux d’épouse et de mère, éventuellement d’infirmière –, certaines parmi elles ont été endoctrinées selon des idées extrémistes et ont joué un rôle dans la propagation de l’extrémisme violent, la facilitation d’actes violents, voire même la contribution à ces actes dans leur pays d’origine, comme c’est le cas pour le Maroc.

A cet égard, la diversité des rôles que les femmes peuvent jouer au sein des groupes terroristes devraient être prise en compte dans toutes les politiques publiques de lutte contre le terrorisme. Ces politiques doivent être développées aussi bien sur la base des spécificités du genre que sur le respect des droits humains.

Dans le but de débattre de l’importance des aspects du genre et des droits de l’homme dans le contexte du terrorisme au féminin, notre intervention constituera une analyse de la politique marocaine de lutte contre le terrorisme sur la base d’une approche basée sur les spécificités du genre et des droits de l’homme.

 

Noufal Abboud, directeur du Centre Nordique pour la Transformation des Conflits

Résumé

Nous avons longtemps été guidés pour appliquer le dicton « penser globalement, agir localement ». Après les attentats du 11 septembre 2001, et en référence à Jane Goodall, primatologue et anthropologue britannique, l’expression doit être plutôt l’inverse : pour être efficace, nous devons essentiellement « penser localement et agir globalement ». Penser globalement, en particulier dans le domaine de la lutte contre l’extrémisme violent au niveau mondial, peut parfois conduire au désespoir et au pessimisme, tandis que les initiatives aux niveaux local et communautaire ont montré des succès clés qui ont dissipé un sentiment d’espoir et d’optimisme sur le terrain. Ma suggestion dans cette présentation concernant les approches à l’égard de l’extrémisme violent et la menace du retour des combattants étranger et leurs familles est la suivante :

  • Les menaces des groupes extrémistes violents et des combattants étrangers revenants/rapatriés au pays d’origine remet en question l’efficience et l’efficacité du domaine de la lutte contre le terrorisme, en particulier dans l’établissement de preuves, la justice et la réalisation des droits de l’homme.
  • La question du retour des combattants et de leurs familles met également en doute certaines boîtes à outils et déjà établies dans le cadre du domaine de la consolidation de la paix en mettant l’accent uniquement sur la crise et non sur la vie quotidienne.
  • Il est nécessaire de réfléchir sur les meilleures approches locales pour traiter le problème et partager à l’échelle mondiale ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, et non pas l’inverse.
Publié le 29 juillet 2021