History and epistemology of finance

Le programme de recherche Histoire et épistémologie de la finance a été envisagé en 1996 à la Fondation de la Maison des sciences de l'homme (FMSH) à l’invitation de Maurice Aymard, puis créé en 1997 avec la participation d’Eric Brian (EHESS) et de Jean-Yves Grenier (EHESS). Cette création offrait une formule de rencontre doublement originale. Tout d’abord, les sciences sociales prenaient ici enfin au sérieux la matière même de l’activité financière. Ensuite, un lieu se formait où se croisaient des protagonistes des mondes financiers et des mondes académiques, qui permettait un dialogue entre les sciences sociales et les acteurs financiers. Ce programme a représenté une démarche à la fois anticipative, puis complémentaire de ce qui a pu se faire ensuite dans d’autres contextes universitaires.

A l’origine : une démarche anticipative

Dans son syllabus de 1997, le programme partait du constat que la finance contemporaine est une activité professionnelle marquée par la pratique intensive de l’usage de formalisations mathématisées qui modélisent l’incertitude au moyen de probabilités. Que cet usage n’aille pas de soi et mérite d’être questionné a été le point de départ. D’où proviennent les modèles probabilistes financiers ? D’où tiennent-ils leur légitimité intellectuelle et sociale ? Qu’a-t-on transposé explicitement ou implicitement dans la finance en provenance d’autres disciplines ? Quelles sont les conséquences éthiques de ces transpositions souvent incontrôlées ? Telles sont quelques unes des questions que le programme de recherche se proposait d’aborder en 1997. Pour y répondre, il fallait mobiliser l’histoire, la sociologie et la philosophie des sciences. Comme l’indique déjà le texte initial du programme, il s’agissait de mettre en évidence le rôle des modèles probabilistes, et donc des systèmes de représentations de la théorie financière, dans les pratiques professionnelles – on pourrait parler aujourd’hui des effets cognitifs et performatifs des modèles et des représentations. Cette question de la performativité des modélisations probabilistes de la théorie financière sur les phénomènes eux-mêmes est au cœur des recherches conduites depuis lors à la FMSH.

Aujourd’hui : une démarche complémentaire

A partir des années 2000, ces travaux se sont déroulés dans le contexte de l’essor des études sociales de la finance en France comme à l’étranger, qui est un domaine particulièrement dynamique aujourd’hui. L’apport et la complémentarité du programme de la FMSH avec ces travaux viennent : d’une part, de son orientation épistémologique ; d’autre part, de ses applications éthiques.

Les travaux de la sociologie de la finance étudient la construction sociale des marchés par les théories, et établissent précisément les médiations mises en place dans certaines situations. Cependant, il existe un aspect qui n’est pas complètement élucidé par ces travaux : l’existence d’un effet endogène des outils mathématiques qui pousse à la fabrication spontanée de nouveaux instruments financiers. Cet usage incontrôlé de la modélisation qui devient un exercice pour elle-même, embarque les professionnels sur de nouvelles pratiques. Dans ces situations, les dérives de la créativité mathématique peuvent avoir des effets sociaux néfastes. C’est cet aspect précis que le programme a cherché à examiner, dans les cas où des analyses épistémologiques et une critique interne s’avéraient nécessaires à la compréhension de l’évolution ou du changement de certaines pratiques professionnelles.

L’enjeu du champ de recherche

Le programme documente l’usage créatif des mathématiques dans la finance, en attirant l’attention sur le risque de dérive résultant du mariage de raison entre mathématiques financières et sciences sociales.

Il est de la première utilité non seulement du point de vue scientifique mais encore du point de vue professionnel, de comprendre la manière dont des cadres théoriques et techniques, des conceptions et des représentations en vigueur contribuent à la construction sociale effective des pratiques professionnelles empiriques que tout un chacun peut observer « sur le terrain ».

Le lien avec l’éthique est ensuite immédiat.

La Chaire « Ethique et Finance »

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Un des résultats de la fonction d’incubation du programme a été la recréation entre 2010 et 2013 de la chaire « Ethique et Finance » à la Faculté de sciences sociales et économiques (FASSE) de l’Institut Catholique de Paris, dont Christian Walter est devenu le directeur en juin 2010. La chaire Ethique et Finance a pour objectif l’étude des relations complexes entre technique et éthique dans le cas de la finance professionnelle.

Liens

Philosophies contemporaines (PhiCo - EA 3562)

Normes, Sociétés, Philosophies (NoSoPhi)
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Chaire Ethique et finance
Faculté des sciences sociales et économiques (FASSE)
Institut Catholique de Paris

CEntre for Financial Risks Analysis
CEFRA - EM Lyon

Site personnel de Christian Walter
Virus brownien Blog à propos de l'ouvrage Le virus B. Crise financière et mathématiques (2009)

Published at 10 September 2013